Après la Chine, l’Iran fait partie des pays qui pratiquent le plus d’exécutions et qui prononcent le plus de condamnations à mort. Si des réformes ont été heureusement apportées aux lois antidrogues en Iran, réduisant significativement le nombre d’exécutions en 2018, le panel a identifié plusieurs problèmes en termes d’État de droit : violations des droits de l’enfant et de la femme, application de la peine de mort pour des crimes « moins graves » (notamment d’ordre économique), application de la peine de mort pour punir les opposants politiques et application discriminatoire de la peine de mort à l’encontre des minorités. Bon nombre de ces questions ont été soulevées lors de la dernière audience de l’Iran à l’occasion de l’Examen périodique universel (2014). À noter que, sur toutes les recommandations formulées à cette occasion, une sur cinq concernait la peine de mort.

L’utilisation de la peine de mort pour sanctionner les « crimes moins graves »

Le premier ensemble de problèmes concerne l’ampleur de la peine de mort. En effet, l’Iran impose la peine capitale face à un éventail exceptionnellement large de crimes. Il est donc essentiel de faire pression sur le gouvernement afin qu’il réduise davantage les crimes passibles de la peine capitale. Si l’Iran a effectivement réduit le nombre de crimes liés à la drogue passibles de peine de mort, le pays continue de condamner à mort des personnes coupables de « crimes moins graves », notamment d’ordre économique et financier, comme la corruption ou la fraude, ce qui est contraire au droit international.

L’application de la peine de mort pour les mineurs

L’Iran continue également de condamner à mort et d’exécuter des mineurs, ce qui est contraire au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et à la Convention internationale des droits de l’enfant (CIDE). D’après les estimations, au moins 85 mineurs attendraient actuellement dans le couloir de la mort en Iran, malgré un amendement de 2013 à l’article 91 du Code pénal, autorisant les juges à exclure les mineurs de la peine capitale.

Les femmes

Des femmes ayant subi des violences sexistes pendant des années continuent d’être condamnées pour le meurtre des hommes qui leur ont infligé ces violences. L’argument de la légitime défense n’est pas admis et les autres circonstances atténuantes ne sont pas envisagées.

L’absence de procédure équitable et les mauvais traitements

En Iran, la procédure judiciaire ne fournit pas de garanties suffisantes aux accusés, ce qui influe sur l’issue des procès. Les jugements sont souvent rendus à huis clos, particulièrement dans le cas des tribunaux révolutionnaires. De nombreux détenus sont condamnés à la suite de procès sommaires, lors desquels ils sont isolés et privés d’avocat. Souvent, les familles des accusés ne sont pas mises au courant que leurs proches ont été arrêtés et ne savent pas où ils sont détenus. Les mauvais traitements infligés après la condamnation posent également problème. Ainsi, les détenus sont souvent passés à tabac, par exemple quand des membres de leur communauté sociale ou de leur minorité protestent (« double peine »).

L’application discriminatoire de la peine de mort à l’encontre des minorités

L’Iran a condamné et exécuté de nombreux opposants à la révolution islamique, depuis son avènement, il y a quarante ans. Aujourd’hui encore, des individus sont condamnés à mort pour des raisons politiques.
Par ailleurs, les minorités sont victimes de discriminations dans l’application de la peine de mort et dans la détention. Ainsi, alors que les Kurdes représentent environ 13 % de la population iranienne, ils représentent 25 % des exécutions et près de 50 % des détenus. Dans la plupart des cas, les Kurdes sont poursuivis pour des raisons de sécurité nationale ou pour « offenses à Dieu ». Le gouvernement soumet aussi les Kurdes à des discriminations quand il refuse de rendre les corps à leurs proches après les exécutions.
De la même façon, alors que les Baloutches représentent 2 % de la population iranienne, ils représentent 20 % des exécutions.
Enfin, les exécutions extrajudiciaires, par des gardiens de la révolution, posent également problème.

L’avenir

Aussi sombre soit la situation, des avancées ont malgré tout été observées : deux objectifs clés ont été atteints récemment. Premièrement, la lapidation à mort a cessé. En 1996-1997, alors que l’Iran et l’Union européenne (UE) venaient d’établir des relations diplomatiques, des vidéos de lapidations sont apparues. L’UE acceptait de maintenir des relations diplomatiques avec l’Iran à condition que cette forme de châtiment soit supprimée. En 2002, l’Iran a annoncé un moratoire sur cette pratique en vue d’y mettre fin, mais les lapidations ont continué. Cette peine a enfin disparu en 2010, après une campagne nationale invitant à mettre fin définitivement à la lapidation. Officiellement, cette peine reste malgré tout autorisée par le droit pénal.
Deuxièmement, en 2017, l’Iran a modifié sa loi antidrogues afin que les crimes liés à la drogue ne soient plus passibles de la peine de mort. Cette réforme a eu pour conséquence directe une baisse considérable du nombre de condamnés à mort : de nombreux détenus ont ainsi quitté le couloir de la mort.

Défis et recommandations

• Les lois doivent impérativement être réformées.
• Même sans réforme des lois, les autorités iraniennes pourraient réduire considérablement le nombre de condamnations et d’exécutions si elles respectaient la Constitution iranienne ainsi que leurs obligations internationales. La communauté internationale devrait les y encourager.

En 2018, le nombre d’exécutions a été le plus bas depuis 2008, date du premier rapport annuel sur la peine de mort publié par IHR. Les chiffres avant 2008 émanaient d’Amnesty International, tandis que, depuis onze ans, ils s’appuient sur les rapports d’IHR. Les chiffres avant 2008 étant tirés des comptes rendus officiels, il est impossible d’exclure la possibilité qu’ils aient été sous-estimés.